jeudi 8 septembre 2011

Le budget, la taxe spéciale et les commerçants

L'arrondissement Plateau Mont-Royal vient de lancer le débat autour de la dotation entre la ville-centre et les arrondissements. En moins de 24 heures, les arrondissements du Sud-Ouest et d'Anjou ont uni leur voie au PMR et il est facile de croire que d'autres suivront.

Les commerçants de l'avenue Mont-Royal semblent être les premiers à se prononcer contre la levée d'une taxe spéciale pour contrer le déficit anticipé. Les citoyens eux ne semblent en avoir que pour les derniers changements de sens de quelques rues locales. Dans ce contexte nous croyons utile de rappeler quelques faits, histoire de bien se comprendre.


Automne 2010. Les commerçants de l'AMR entrent en guerre avec le maire de l'arrondissement avec une campagne de salissage et d'accusations mensongères avec des affiches dont la Société de Développement de l'Avenue du Mont-Royal n'a même pas payé de droits d'auteur au photographe. Précisons ici que les restaurateurs se sont tous abstenus de placarder cette affiche et que quelques autres commerçants indépendants ainsi que les institutions financières et la SAQ ont fait de même.

Les résidents qui achètent dans ces commerces se sont sentis insultés et non respectés puisqu'ils avaient voté majoritairement pour l'équipe du maire Ferrandez et son programme incluant différentes mesures d'apaisement de la circulation. Le directeur de la SDAMR a clamé dans tous les médias que l'enfer était sur le Plateau, pas de stationnement (il y a toujours 24 000 places gratuites au moment où on se parle) pas de déneigement, et un maire tyrannique et anti-démocratique. Il est important de noter ici que ce même directeur a refusé de participer à des comités de travail avec des citoyens et des élus, ou il  s'en est retiré en claquant la porte.

Rappelons qu'au départ, la SDAMR appuyait les mesures d'apaisement de la circulation. Mais tout à coup, l'augmentation du tarif des parcomètres est venue mettre le feu aux poudres et là nous sommes tombés dans des actions vraiment disgracieuses. Des commerçants ont perdu des clients et des blessures demeurent toujours ouvertes grâce aux grandes habiletés de relations publiques du directeur de la SDAMR. Toute cette histoire fut finalement "gérée" par le maire Tremblay qui en bon père de famille a tout arrêté suite au lobby des sociétés de développement commercial, et fait signer une entente à l'arrondissement PMR. 

L'entente  dit ceci:
  1. L'arrondissement PMR étalera sur deux ans la hausse de 1$ du tarif des parcomètres sur le réseau local ; précision importante, l'arrondissement n'exerce aucun pouvoir sur les artères St-Denis, Parc, St-Laurent. L'avenue du Mont-Royal fait partie du réseau local sous la responsabilité  l'arrondissement ;
  2. 100% des nouveaux revenus générés par cette hausse et par l'ajout de nouveaux parcomètres sur le réseau local seront retournés à l'arrondissement ;
  3. Quant aux parcomètres sur le réseau artériel, les commerçants estiment qu'il y aurait davantage de cohérence à ce que les montants soient les mêmes que sur le réseau local, les rues s'entrecroisant, et demandent donc au maire de Montréal d'ajuster les tarifs en conséquence. L'augmentation serait versée dans un fonds servant à la vitalité économique des SDC et des artères commerciales de l'arrondissement ;
  4. Grâce à cette entente intervenue, l'arrondissement n'aura pas recours à une taxe spéciale.

Voilà pour les faits. Les méthodes de calcul complexes de la ville-centre semblent toutefois avoir fait en sorte que l'arrondissement ne recevra pas 100% des nouveaux revenus générés, tel que convenu. Cette entente n'étant pas respectée, le lobby des SDC pour mieux tirer leur épingle du jeu nous précipitent vers une taxe spéciale. Mais elles continueront de bénéficier d'un apport financier important avec le fonds créé à leur intention et dont on ne connait pas encore le mode de gestion. L'art de se tirer dans le pied et celui de son client! Pour nous citoyens payeurs de taxes foncières, rien, pas de petit fonds pour nous permettre de nous revitaliser!!!

Les services que doit rendre un arrondissement se financent à partir de revenus et ces revenus proviennent de la dotation, c'est-à-dire ce que la ville-centre nous retourne une part des revenus que nous générons en taxes foncières, stationnement, etc. Or, ces revenus que nous générons augmentent chaque année (principalement avec la taxe foncière selon l'évaluation municipale qui augmente, etc.) mais le retour de ces taxes à l'arrondissement baisse toujours.

Dans le budget d'opération de l'arrondissement, il faut assumer les coûts relatifs à l'augmentation des salaires et celles relatives aux fonds de retraite et autres avantages sociaux compris dans les conventions collectives des cols bleus, cols blancs, policiers et pompiers. Une grosse facture qui augmente chaque année. S'ajoute à cela l'augmentation normale du coût de la vie, des contrats, de l'essence, du chauffage, de l'entretien, etc.

Le maire de Montréal garde notre argent et dit aux arrondissements que ce n'est pas son problème, que c'est du chialage et qu'ils n'ont qu'à mieux gérer leurs affaires. Le conseiller Deschamps responsable du développement économique assure les commerçants de son appui indéfectible. Et nous les payeurs de taxes, qui va nous accorder son soutien indéfectible ? 

Jamais on n'aborde l'épineuse question de la capacité de générer des revenus. Dans l'arrondissement St-Laurent où il y a de grands parcs industriels et du terrain pour développer encore de l'habitation, ça peut aller, mais dans des quartiers centraux comme le nôtre, déjà hautement densifiés, les revenus générés par de grands projets immobiliers, il faut oublier ça. Et que reste-il? Le stationnement, la tarification des services, une taxe spéciale?

Ce n'est pas aux maires d'arrondissement qu'il faut s'en prendre, mais bien à la ville-centre. C'est au conseil de la ville-centre qu'il faut se présenter le 26 septembre prochain, pour réclamer des modifications majeures au système qui démontre, dix ans plus tard,  qu'il est inéquitable autant qu'il est inefficace et nous mène tout droit vers des déficits et des affrontements plutôt qu'à la reconstruction d'une ville en retard d'au moins 40 ans sur les autres métropoles du monde. Et surtout, surtout, il faut soit en finir avec le régime spécial qui a été accordé aux anciennes villes et réduire leur dotation budgétaire, soit augmenter à parité la dotation des arrondissements de l'ancienne ville de Montréal.  Il n'y a pas d'autre solution.


Une fois ce contexte établi, revenons maintenant à ce que pourrait faire la SDAMR de l'argent qu'elle pourrait recevoir du fameux "fonds de stationnement". D'entrée de jeu, précisons que la SDAMR avait déjà entre les mains depuis février 2010 une analyse de positionnement réalisée par le Groupe Altus ainsi qu'un plan de marketing (décembre 2010). Et bien que nous en doutions, nous souhaitons sincèrement que ses membres possèdent aussi  cette information.

Rappelons-nous que le directeur de la SDAMR a clamé sur toutes les tribunes que les principaux compétiteurs de l'AMR sont le Quartier Dix-30, les centres commerciaux de Laval, etc. Et ces faussetés ont été largement reprises par des commerçants, des citoyens, des journalistes, alouette !...  L'étude démontre au contraire que les principaux compétiteurs de l'AMR sont les autres artères commerciales du Plateau comme St-Denis, Laurier, St-Laurent et bien sûr, le centre-ville. On y apprend également que le stationnement n'est PAS l'élément-clé du développement de cette belle artère commerciale longue de 2km et qu'elle est à la fois une artère de proximité et de destination: "Avec ses 418 établissements commerciaux totalisant 874 438 pieds carrés de superficie brute, elle se hisse également parmi les destinations commerciales importantes de la métropole".[1]

Au chapitre des recommandations, on mentionne l'importance de développer le créneau artère de proximité et qu'il y a encore beaucoup de place pour les commerces  du secteur de l'alimentation et plus particulièrement du type équitable et écologique. On ajoute que 92% des résidents sondés désirent un marché public mettant en vedette les producteurs locaux. Dans le créneau artère de destination, on recommande l'embauche rapide d'un agent recruteur afin de faire un démarchage efficace de nouveaux commerces contribuant à la vitalité commerciale. En quelque sorte, attirer une boutique Apple plutôt qu'un A&W. Finalement, il faut établir des lignes directrices d'aménagement (façades, enseignes, mobilier urbain, affichage) qui véhiculent l'image d'une destination commerciale d'avant-garde et distinctive. On est bien loin de la vente-trottoir, genre marché aux puces bancal,  début  septembre sur Mont-Royal...


Donc, PMV demande : Que fera la SDAMR avec ce nouveau financement ? Développera-t-elle une vision et un plan de développement commercial qui réponde à la fois aux besoins des commerces existants tout en consolidant et développant l'offre actuelle? Travaillera-t-elle avec les résidents, les consommateurs, la Corporation de Développement Économique Communautaire (CDEC), avec les élus et les fonctionnaires de l'arrondissement ou fera-t-elle encore cavalier seul ?

Il est grand temps de bâtir quelque chose d'aussi fort que notre sentiment d'appartenance au quartier. Tout le monde sera gagnant. Cessons de nous quereller et construisons ensemble un milieu de vie et une destination commerciale unique et originale et que ceux qui n'en ont que pour les petits pouvoirs et les miteux rapports de force se tassent.


Linda Vallée,
pour PMV


[1] Analyse de positionnement commercial, Avenue du Mont-Royal. Groupe Altus 2010

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