Bonjour mes voisins,
Je respecte beaucoup François Cardinal de La Presse. Il est plein de bon sens et réfléchi. J’aime le lire.
Vu comme lui de l’extérieur, il a raison. Il pense global comme ce devrait être idéalement. Les transports en commun sont la solution, mais qui, en haut lieu, s’est vraiment soucié de penser global avant les bouchons brûlants de cet été? On pense par morceau et ça prend un grand mélodrame au Québec pour qu’on se réveille. Mais se réveiller ne veut pas dire agir.
Vu de l’intérieur, c’est une autre paire de manches que tout le monde semble ignorer. Les médias ont donné la parole aux contre. Les pour ont été écartés. Si bien que si tu es pour, tu passes pour antisocial, puisque le bien-être de la population de la grande région de Montréal est en jeu!
Sait-on que depuis vingt-cinq ans maintenant, les gens du Plateau se plaignent du nombre de voitures (et il y en a de plus en plus), de leur vitesse, de la pollution atmosphérique, d’insécurité et du bruit. Depuis le début des années 80, on en a des échos dans les articles de journaux, dans de multiples plaintes au Conseil de quartier, comité de la rue Christophe Colomb, comité de la rue Rivard, Association des résidents et résidentes du Plateau, Rue pour tous avec Christian Boulais, un autre avec Luc Ferrandez, les Colombos du Plateau, le Comité de circulation de la Maison d’Aurore composé de neuf comités de rues différentes. J’ai été mêlée à presque tous. Grâce au dernier comité, nous avons pu enfin aller sur la place publique et nous faire entendre.
Pendant près de cinq années, des milliers de personnes sont venues nous voir, discuté avec nous, marché avec nous, protesté avec nous, affiché dans leurs fenêtres Maximum 30 et Trop d’autos trop vite, aidé à planifier le PDU citoyen qui a mis de la pression sur l’administration de l’arrondissement puisque c’est de son ressort maintenant, et Michel Labrecque a péniblement sorti le PDU qui nous promettait des changements assez timides d’ici 2025. Et pourtant le constat était déjà clairement établi dans le Plan de transport et le Plan d’urbanisme de la Ville au début des années 90. Il y a de quoi s’énerver.
De sorte que quand Luc Ferrandez s’est présenté aux élections avec un programme qui répondait enfin à nos espérances, nous l’avons élu avec sa gang au complet. Et de plus, il connaissait notre impatience. Dans toutes les villes de l’Île, fusionnées ou défusionnées, on connaissait le problème galopant posé par la circulation de transit et on agissait pour le bien-être de la population et on continue de le faire. Mais dans les quartiers montréalais, nenni.
À Québec, il n’y a qu’un problème : la fluidité. À Montréal, l’apaisement de la circulation, c’était et c’est toujours le dernier des soucis malgré les recommandations que l’on peut lire dans de multiples rapports parus au cours de la dernière décennie. Ne pas toucher - c’est un sujet impopulaire. Et il y a plus important.
Il aurait donc fallu comme François Cardinal le suggère, attendre que la solution vienne de l’extérieur. Mais d’après notre expérience, dans 50 ans ce ne sera toujours pas réglé de la façon que c’est parti. J’ai bien peur que je serai morte bien avant…
On admire les reportages de Gentile à Radio-Canada sur Stockholm, on cite en exemple ce qui a été fait à Portland, au Danemark, en Allemagne, Paris, etc. Il y a plein de conférences sur l’aménagement des villes, etc. Quelques rares journalistes ont fait allusion à l’environnement en glissant rapidement. On dit deux mots positifs des intentions du maire, et ensuite on passe aux doléances… Et si Ferrandez parlait des vraies choses pour le présent et l’avenir, pas juste pour le Plateau, mais pour une vraie vie urbaine montréalaise? Et que les familles y trouvaient leur bonheur ?
François Cardinal a dit que tout était dans la manière. Quand il s’agit d’autos, il n’y en a pas de manière. Quelle que soit la formule, ça crie! Pas dans ma cour! Touches-y et tu vas voir! Et c’est ainsi partout dans le monde, pas juste sur le Plateau. Volonté politique, vous connaissez?
Les médias nous ont appuyés quand nous dénoncions la situation au Comité de circulation. Maintenant qu’on est dans la réalisation, ils sont partis du côté des chialeux qui sont ma foi admirablement bien servis! L’émotion, ça parle! Et pourtant, on ne les a pas fait disparaître les 10,000 voitures concernées, on leur a juste demandé de passer matin et soir sur les artères tel que voulu par la hiérarchie des rues. À la vitesse qu’elles passent, elles n’ont pas envie de s’arrêter, c’est facile à voir. 10,000 véhicules dans une mer de 625,000… De plus en plus, les gens qui ont cru les messages alarmistes de tout un chacun et qui nous ont évités pendant des mois, nous font avec surprise la remarque suivante : « Mais c’est comme avant, ça passe très bien et il y a toujours du stationnement ». Mais bien sûr.
Car voyez-vous, de toute façon, les automobilistes ont trouvé dans leur bouillon de rage d’autres chemins et Christophe-Colomb a presque autant d’autos qu’avant au sud de Mont-Royal. Il aurait suffi que le Maire de Montréal apaise les esprits et chacun aurait trouvé son vrai chemin. Il a délégué la responsabilité aux arrondissements, mais il a droit de vie ou de mort dessus. Il passe par des voies détournées. Non seulement les émotions sont privilégiées, mais il fait de la politicaillerie! Ça paraît bien auprès des contre. Je rêve de remplir de ciment les cônes de la rue Gilford… Mais chut!
Derrière notre maire d’arrondissement, il y a pourtant les besoins d’une population de près de 103 000 citoyens pas juste des marchands. Ma rue étroite a été apaisée en inversant un segment. Jamais je n’aurais cru, depuis trente ans que j’y habite, que je pourrais jouir d’une telle qualité de vie. Ça ne concernait qu’une bien moindre quantité de voitures, soit, mais elles n’étaient pas au bon endroit. Mais il a fallu au moins 15 ans de lamentations pour y arriver.
Le Maire Tremblay oublie-t-il que ses services centraux ont supervisé le projet piloté dans l’arrondissement par un comité aviseur et des spécialistes, en plus de rencontrer des recommandations que l’on trouve dans le PDU du Plateau préparé par des membres de son propre parti et l’argent des citoyens? Dans ce domaine, encore faut-il être sensibilisé. Il faut y aller avec des essais, erreurs, corrections, on n’a pas le choix. L’automobiliste est une drôle de bibitte souvent imprévisible.
En tant que résidente, moi aussi je me sens, dans cette saga, un bouc émissaire, car je suis solidaire et j’en souffre. Ma foi, je vais arrêter de me cogner la tête contre les murs. Je constate que nous n’avons pas d’autres solutions que de crier fort et d’être télégéniques! De plus, que ce n’est pas tellement la raison qui prime mais le bruit.
Huguette Loubert,
Membre de Plateau milieu de vie
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